Le lundi 19 mars 2007, un débat des Rencontres Wallonnes de l'Internet Citoyen (
REWICS) était consacré à
une réflexion sur l'avenir des EPN à l'horizon 2008-2010. Le supplément Dot.Gov du magazine Trends Business ICT (édition spéciale, mai 2007) est revenu sur ce débat avec un article signé Jean-Luc Manise reproduit ci-dessous. Merci à Damien Maillard (
EPN E-Yvoir) pour nous avoir fourni une copie de ce papier.
Ancrer son EPN à l'horizon 2010
(thème : démocratie interactive)
Suite à l'appel à projets de 2005, les Espaces Publics Numériques ont fleuri sur l'ensemble du territoire wallon. Au total, on en dénombre aujourd'hui plus de 60. Quelle est leur utilité sociale, comment s'intègreront-ils dans leur tissu local ? Quelles sont les stratégies pouvant permettre "d'ancrer son EPN dans la cité", à l'horizon 2008-2010 ? Tel était le sens du débat modéré par Jean-Luc Raymond, consultant français en projets numériques citoyens.
L'atelier a réuni Hervé Fournier, MJC Boby Lapointe de Villebon-sur-Yvette (France), Nathalie Caclard, CIDJ Paris (France), Emmanuel Vergès, Espace Culture Multimédia de la Friche de la Belle de Mai, Marseille (France), Fabien Lambert, CRIJ Picardie (France) et Philippe Rondas, Verviers (Belgique). Que retenir de cette réunion ? Jean-Luc Raymond : "Un des premiers éléments importants soulignés par tous les intervenants, c'est l'importance du local. Il est crucial de travailler sur son territoire, d'apprendre à connaître et à communiquer avec l'éco-système local. Il faut rencontrer son ou plutôt ses publics en s'appuyant sur les dynamiques locales existantes : les ASBL, les CPAS, les pouvoirs locaux, les écoles, les chambres d'industrie et de commerce et les syndicats d'initiative..."
Stratégies de développement
"Animateur d'EPN, en Belgique, c'est un nouveau métier. Qui connaît deux difficultés principales. L'isolement tout d'abord, d'où l'intérêt de la création du Centre de ressource des Espaces Publics Numériques de Wallonie (
www.epn-ressources.be ). Et la difficulté à identifier, à approcher les publics précarisés, qui ne vont pas directement venir dans des lieux comme les bibliothèques ou les ASBL. Pour les sensibiliser, il faut déployer de gros efforts d'animation et de communication, aller sur le terrain, dans les quartiers mêms avec parfois des dispositifs mobiles."
Education aux médias
"Les participants ont également évoqué l'importance de l'éducation citoyenne et critique aux médias. Il s'agit d'avoir un recul critique par rapport à l'utilisation des technologies. Les EPN sont des lieux non marchands qui vont avoir un rôle de plus en plus important à jouer dans la capacité à apprendre aux utilisateurs à évaluer, à valider l'information délivrée via Internet. C'est une dimension spécifique que le secteur privé n'a peut-être pas naturellement vocation à aborder."
Réseaux d'échange de savoir
"Un troisième volet est ressorti du débat, qui concerne l'éducation tout au long de la vie. L'EPN est un lieu privilégé où se rencontrent différentes générations de citoyens : enfants, étudiants, adultes, seniors. C'est l'un des rares lieux sociaux où il va être possible de développer des initiatives de transmission de savoirs intergénérationnels. Les EPN peuvent être des lieux où il s'échange véritablement du savoir, où des réseaux se créent de manière spontanée. Ce sont des lieux non marchands où des thématiques comme les logiciels libres se développent naturellement."
"J'ajouterai qu'il y a un travail tout à fait considérable à effectuer au niveau de l'administration en ligne pour favoriser l'appropriation par les publics des EPN de ces nouveaux services. Je songe bien sûr aux portails des communes, mais aussi pourquoi pas à des sites comme ceux des TEC ou de la SNCB. Ce sont de nouveaux services proposés à la population. Et puis il y a tout l'aspect de promotion de la culture et des savoirs locaux. Certains participants ont insisté sur le début de l'existence d'une histoire et d'une culture de l'Internet et du multimédia. Il est possible par ce canal de mettre en exergue les valeurs patrimoniales, de créer une mémoire du patrimoine et des artistes locaux. On peut aussi réfléchir à la manière dont les élus locaux doivent prendre en compte les nouveaux modes d'expression citoyenne comme les blogues. C'est un nouveau type de relations, de communication entre le politique et le citoyen."
C'est que souligne Philippe Rondas : "Le Web 2.0 et son cortège de moyens collaboratifs émergents (wiki, forums, etc.) pourront un jour permettre plus d'interactivité entre les politiques et les citoyens (pour autant qu'une réelle volonté politique d'utiliser ces moyens apparaisse). Les EPN pourraient alors devenir des lieux où s'exercerait une nouvelle forme de démocratie, plus interactive. Les citoyens seraient mieux informés, et les politiques pourraient prendre régulièrement le pouls de l'opinion publique."
Miser sur l'innovation
Plus largement, il s'agit d'inscrire l'EPN dans ce qui est émergent : "Autrement dit développer des ateliers d'initiation au multimédia ou de repérage de ressources liés à la mobilité, au développement durable et préoccupations environnementales, ou encore à de nouveaux volets pédagogiques (comme les "serious games" ou jeux dits sérieux qui sont des jeux en ligne d'apprentissage avant tout)..." Bref, jouer la carte de l'innovation.