Il y a des réalités qui sont difficiles à percevoir parfois dans nos "petits chaussons" d'internautes occidentaux habitués au "presque partout" haut-débit, à la relative facilité à trouver un ordinateur pour "avancer" dans la vie ou pour les loisirs, à cette vague annoncée quasi-prophétique du Web 2.0 qui révolutionnerait le monde voire les échanges commerciaux de notre planète. Les scénarios d'usages d'un futur clinquant sont bien pâles au regard de la réalité de la fracture numérique.
De ces discours emphatiques malhabiles de technophiles où nous aimons découvrir et faire découvrir, dans une curiosité d'esprit certaine, il y a involontairement parfois l'oubli d'un ailleurs... D'une planète où à peine 25% des humains ont la possibilité de se connecter à Internet (tout en sachant qu'il ne s'agit là que d'une possibilité technique à laquelle il faut ajouter l'inévitable et long apprentissage), où la notion même du raccordement électrique relève quasiment du miracle.
De cette réalité d'un ailleurs, nous ne percevons le plus souvent que des bribes d'informations, des initiatives qui ont du mal à perdurer faute de moyens, d'organisation... Et non pas faute à la volonté locale d'avancer. Avec le temps et la redondance des problèmes, nos médias occidentaux sont devenus peu sensibles au sujet de ceux qui n'ont pas accès à Internet et à ceux qui ne savent pas, surtout lorsque cela concerne des personnes à des milliers de kilomètres de notre Europe.
Parfois, dans un élan soudain, on voit poindre des récits de là-bas, d'un inconnu pour des causes connues et l'on se plaît à imaginer un coup de baguette magique qui pourrait changer la situation.
Hier, le quotidien Le Monde sous la plume du journaliste Bertrand Le Gendre a publié un remarquable article-reportage sur les difficultés de l'accès à Internet au Burkina Faso... et l'espoir... l'espoir... A lire impérativement : "
Au coeur de la fracture numérique" :
"Aujourd'hui, 80 % des habitants de la planète sont exclus des réseaux d'information mondiaux. Moins de 4 % des Africains sont connectés au Web, la plupart au Maghreb et en Afrique du Sud. Et 0,5 % des Burkinabés seulement utilisent Internet (...)
Cette antenne satellitaire arrose, grâce à une liaison sans fil Wi-Fi, un cybercafé proche du centre de télémédecine. Enfants rieurs le nez collé à l'écran, commerçants affairés, élèves préparant un exposé, fonctionnaires consultant le site de leur administration... A Zorgho et ailleurs, les cybercafés font aujourd'hui partie du paysage. Le Burkina en compterait une centaine.
Dans ce pays analphabète à 70 %, où le papier manque, où les bibliothèques dignes de ce nom sont rares, où 7 % des familles seulement ont la télévision, Internet est une source jaillissante d'images, de textes et de sons, à laquelle les déshérités du savoir, les frustrés du réseau planétaire, viennent étancher leur soif."